dimanche 27 mars 2011

Sriwijaya invisible 1: Palembang

statuette en bronze du Buddha Maitreya, en position assise, portant collier 
à motif central, ceinture à fermoir orfévri, brassard à fleuron, cordon
 brahmanique, et un diadème surmonté d'une tiare (ou un chignon?) à motif de
 stupa à neuf étages dans une niche qui se termine en bouton de lotus
(entre le VIIème et le XIIème siècle selon les indications imprécises
du musée de Palembang)

Entre le VIIème siècle et XIème siècle de notre ère, le site de Palembang (Sumatra Sud), le long de la rivière Musi, a été le centre de l'empire maritime de Sriwijaya qui a rayonné sur l'Asie du Sud-Est insulaire. Des pélerins venant d'Inde ou de Chine et bien sûr d'Asie du Sud-Est y séjournaient et y recevaient des enseignements bouddhiques. Quasiment aucun vestige, en dehors de quelques stèles, statues et vestiges archéologiques, transférés pour l'essentiel au musée de Jakarta, ne permet de s'en faire une idée. Il faut dire que beaucoup des constructions de l'époque étaient en matériaux périssables qui n'ont pas résisté au temps, tant en raison du climat que des vicissitudes de l'Histoire (au XIVème siècle, Palembang semble être devenu tributaire de l'empire de Mojopahit de Java Est).
Entre temps, au début du XIème siècle, des incursions venues d'Inde ont mis à mal Palembang avec pour conséquence le transfert du centre de cet "empire" à Jambi (Sumatra Est), le long de la rivière Batang Hari. Là, un important site archéologique, Muara (prononcer Muaro) jambi est en cours d'exploration; huit édifices de brique ont d'ores et déjà été restaurés, soit environ un dizième.


la place horrible devant la Grande Mosquée (Masjid Agung) de Palembang,
 avant d'accéder au pont Ampera
Aujourd'hui, Palembang, plus d'un million et demi d'habitants, est une ville hideuse, sans âme et polluée. Les trottoirs, lorsqu'ils existent, sont défoncés. L'architecture, quand elle n'est pas faite de bric et de broc, est souvent sous l'influence des constructions de "style international" (c'est à dire de ce style d'architecture moderne qui ne cherche pas à s'inscrire dans un environnement existant mais prône la rupture radicale, et opte pour des lignes simples horizontales et verticales, associée à l'usage de matériaux nouveaux, béton, verre, acier). Sauf qu'il y a d'excellentes architectures de style international, mais que celle qui s'est répandue en Asie du Sud-Est dans les années 60-70-80 est le plus souvent laide, car elle a été mal assimilée par les architectes qui ont oeuvré, et les matériaux utilisés sont de mauvaise qualité et vieillissent mal. Les enseignes anarchiques achèvent de défigurer l'ensemble.


la rue principale (jalan Sudirman) au droit du pont Ampera

La ville est traversée par la rivière Musi qu'enjambe un pont, lui aussi sans intérêt, l'Ampera.


le pont Ampera

On voudrait voir l'architecture vernaculaire, souvent des maisons de bois sur pilotis; en quittant le centre et les grands axes on en voit un certain nombre, à 99% défigurées par des restaurations ou des adjonctions inadéquates, dans un environnement qui n'est pas entretenu, voire est franchement sale.
Difficile de faire coincider cette image avec l'Histoire glorieuse. 

Les seuls lieux correctement entretenus sont les lieux de culte: les nombreuses mosquées et quelques temples chinois bouddhistes ou confucianistes (klenteng) aux couleurs criardes. Cet état de fait est sans doute d'une certaine manière le reflet d'une facette de l'évolution de la société indonésienne: réislamisation depuis les années 80-90, nouvelle visibilité de la minorité d'origine chinoise depuis le début des années 2000 (rappelons que la croyance en un Dieu unique est inscrite dans le Pancasila, socle idéologique de la constitution indonésienne, et que Confucius -Kong Hu Cu- a été admis à ce titre au lendemain de l'effondrement du régime autoritaire de Suharto en 1998. Les autres croyances en un dieu unique reconnues par l'Etat sont - au besoin au prix de quelques contorsions pour certaines d'entre elles - l'Islam, le catholicisme, le protestantisme, l'hindouisme, le bouddhisme).


la Grande Mosquée, construite au milieu du XVIIIème sous l'impulsion
 du Sultan Mahmud Badaruddin, avant son extension dans les années 1930
au premier plan la Grande Mosquée (Masjid Agung) restaurée, avec son minaret
et sa toiture caractéristiques, et à l'arrière l'extension récente (années 1930),
 et le nouveau minaret de style allogène (1970)
l'ancienne mosquée (restaurée) avec ses toits superposés dans le style indonésien
 et sur chaque façade un petit pavillon aux toits recourbés (une influence chinoise)
La présence chinoise est ancienne. Si l'on traverse le fleuve Musi, on peut d'ailleurs voir le kampung kapiten (kampung = village), où trois maisons auraient été édifiées dit-on dès le XVIème siècle (?) par un clan (marga = famille élargie) chinois, la famille Tjoa. 


la première des trois maisons donnant sur la place.
 On appréciera l'adjonction rose...

la maison du milieu, avec une colonnade sans doute plus récente
maison de la famille Tjoa, où se trouve le lieu de culte
c'était trop beau! un aménagement franchement laid de la petite place, pourtant
pour une fois épargnée par la circulation,  est venu défigurer les lieux...
Palembang accueille cependant également quelques tombeaux de saints ou de personnages importants de l'Histoire locale, où l'atmosphère est plus prenante. 
(à suivre...)

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