mercredi 23 février 2011

géométrie et humidité au Tamansari (1)

Construit à Yogyakarta au milieu du XVIIIème siècle dans l'enceinte du kraton (palais), le Tamansari s'étendait sur une dizaine d'hectares et comprenait de nombreux bâtiments et bassins, dont un lac artificiel (Kolam Segaran) au milieu duquel était un bâtiment à étages (Pulau Keranga) maintenant ruiné. Le Sultan y accédait par un tunnel sous l'eau.


Denys Lombard a précisé le sens des taman, terme mal traduit en français par "jardin": 
"En fait, l'idée essentielle n'est nullement celle d'un lieu où, comme à Versailles, la nature devient artifice pour le plaisir des yeux et de l'esprit. Il s'agit avant tout d'un espace clos et réservé, où le roi peut se retirer et méditer (...), où il accroît par des exercices son degré d'efficacité (...) et se pénètre d'effluves revivifiantes (...). Pour mieux comprendre ce mot taman, sans doute faut-il songer au firdaus des Persans et au paradeisos des Grecs. C'est une oasis d'espace céleste" (in Le carrefour javanais, essai d'histoire globale, tome 3 "l'héritage des royaumes concentriques", p.111  )
L'ensemble est à présent asséché et le bassin a été peu à peu envahi par les habitations des serviteurs du palais. Mais les accès à l'île sont toujours visibles et l'on emprunte le passage lorsqu'on visite les lieux. J'y reviendrai.


Aujourd'hui, on commence par visiter le Umbul Winangun, espace jadis réservé dit-on au bain des femmes du sultan, et clou de la visite touristique, et ce n'est qu'ensuite que l'on emprunte quelques ruelles menant à un bâtiment plus curieux, bien que plus secret, le Sumur Gumuling ( sumur = puits).

l'extérieur du Sumur Gumuling (photo JLA)


L'accès à cet édifice circulaire original à deux niveaux, maintenant engoncé au milieu des habitations, se faisait également par un passage subaquatique. 


devant l'entrée du passage subaquatique (photo JLA)


tunnel d'accès au Sumur Gumuling (photo JLA)


Le Sumur Gumuling était semble-t-il utilisé par le sultan comme mosquée et lieu de méditation. Aux deux niveaux on peut voir des ouvertures formant mirhab.

mirhab du niveau inférieur, orné dans le style javanais (photo JLA)

Au centre de l'anneau bâti, l'espace est ouvert. Partant du niveau inférieur, quatre volées d'escaliers se rejoignent au centre, formant une sorte de petite estrade d'où s'élève une unique volée d'escalier vers le second niveau, réservé aux hommes.
La géométrie des lieux, doublée de la présence de l'eau, crée une atmosphère saisissante et paisible.
Je laisse parler les images.

au centre les escaliers partant des ouvertures
du niveau inférieur se rejoignent au dessus de l'eau
(photo JLA)


quatre ouvertures au niveau inférieur
donnent accès aux escaliers
(photo JLA)


l'humidité couvre les murs de compositions abstraites
(photo JLA)


compositions qui se conjuguent à la géométrie
(photo JLA)


sous l'escalier menant au second niveau
(photo JLA)


depuis la petite estrade, l'escalier montant au second niveau
(photo JLA)


ouverture située sous l'escalier du second niveau
(photo JLA)


courbes et droites (photo JLA)


ouverture ouvrant sur le "puits" (photo JLA)


l'une des ouvertures donnant accès à un escalier
(photo JLA)


une autre ouvrant sur le "puits" (photo JLA)


une autre ouverture donnant accès à un escalier
( photo JLA)


arche et composition abstraite I (photo JLA)


arche et composition abstraite II (photo JLA)


espace non identifié dans une niche; espace réservé aux ablutions?
(photo JLA)


vue sur l'estrade de méditation depuis le second niveau
(photo JLA)


composition géométrique (photo JLA)


depuis une ouverture du second niveau
(photo JLA)


un segment de l'anneau circulaire du second niveau; on voit au fond le mirhab,
dénué des ornements du mirhab du niveau inférieur
(peut-être est-ce lié à une restauration?)
(photo JLA)


depuis l'estrade de méditation (photo JLA)


mercredi 16 février 2011

warung "SS"

Récapitulons. Un warung est une sorte de cantine au confort sommaire, souvent en plein air ou sous un abri (et par ailleurs une petite boutique de village où l'on trouve de tout). Le sambal désigne un ensemble de condiments au piment, le plus souvent fort.

sambal terasi


A Yogya, l'un des warung spécialisés dans le sambal propose un plaisant menu, reflet de l'humour indonésien. A noter que le client coche lui même ce qu'il commande.

Tout d'abord le nom du warung (orthographe ancienne "waroeng"), Waroeng Spesial Sambal "SS" Pedas Abis ( pedas = épicé, pimenté, brûlant, fort...) se réfère sans tabou à l'histoire violente de l'Europe; ça rigole pas ici avec le sambal!


extrait du menu du Waroeng SS


Ensuite les différentes recettes de sambal, suivis de leur "nama usil" ( usil = sens ici: ironique ).

  • Le "sambal belut" ( belut = anguille > association d'idée gelut = lutte ) est surnommé "smack down"( = lutte, catch).
  • Le "sambal teri" ( teri = anchois > association d'idée keri/geli = coup de pied de karaté ) est surnommé "geli" ( = chatouiller, ou coup de pied de karaté ).
  • Le "sambal tempe" ( tempe = sorte de pâté de soja avec des graines > expression "mental tempe" = manque de confiance ), "unconfidence".
  • Le "sambal tahu" ( tahu = crème de soja ), "pedhe", c'est à dire PD prononcé à l'indonésienne, acronyme de "percaya diri" ( = confiance en soi ), c'est le contraire du tempe !
  • Le "sambal terasi segar" ( terasi = pâte à base de crevette ou de poisson > association d'idée terasa > terasa segar = se sentir en forme, après le sport par exemple... ), "sport".
  • Le "terasi tomat segar" ( = tomate fraîche > acronyme TTS = teka teki silang = mots croisés ), "pusing" ( = avoir de mots de tête, quand on fait des mots croisés hehehe ).
  • Le "terasi lombok ijo" ( Lombok = petite île voisine de Bali, et ijo = hijau = vert  ), "horor" car le vert évoque la couleur verte glauque dans les films d'horreur.
  • Le "sambal bawang" ( bawang = ail > association d'esprit gawang = buts -- au football ), "goalpal" ( but!?).
  • Le "bawang lombok ijo" ( cf. ci-dessus sur la couleur verte ), "hantu kiper" (hantu = fantôme, kiper = gardien de but). Les fantômes sont tenus en respect par l'ail et le sambal.
  • Le "sambal kecap" ( kecap = sauce de soja > association d'idées ucap = ngomong = parler de tout et de rien ), "bulishit" (adaptation indonésienne de l'anglais bullshit = ineptie, connerie).
  • Le "sambal rempelo ati" ( rempelo = gésier, ati = coeur, foie ), idée que l'on a déjà eu les entrailles et on demande le coeur, donc "kurang ajar" (= impoli, insolent).
  • Le "sambal bajak" ( bajak = pembajak = pirate, ravisseur  ), "teroris" (sans commentaire).
  • Le "sambal tomat", ( > association d'idées tamat = fin, d'un livre, d'un film...), "the end".
  • Le "sambal gobal-gabul" ( gobal gabul évoque un mélange qui n'est pas clair ), "bingung"( = mot très employé pour exprimer la confusion de son esprit dans telle ou telle situation, qu'on est déconcerté, désorienté, ...).
  • Le "sambal terong" (terong = aubergine > association d'idées barong = dragon animé par plusieurs danseurs), "raksasa" (ogre, démon, ou bien monstrueux).

Ces dénominations correspondent en fait à des mots ou expressions employés à tort et à travers. dans la vie quotidienne.

Jeux de mots et associations d'idées sont un jeu permanent qui déclanche sans cesse l'hilarité. Il faut pouvoir suivre...

Sur le plan linguistique, tout un chacun remarquera l'influence de l'anglais, dont beaucoup de mots sont intégrés peu à peu dans cette langue poreuse qu'est l'indonésien, qui comprend des mots d'origine sanskrite (un millénaire d'influence indienne), arabe (cinq siècles de présence influente de l'Islam), puis hollandaise (le colon, depuis le XVIIème siècle) et anglaise désormais..., le tout sur un substrat "insulindien".

vendredi 11 février 2011

Intiwatana et candi bentar


l'Intiwatana au Machu Picchu


l'Intiwatana au Machu Picchu, sous un autre angle

Thème précolombien et influence moderniste.

Lorsqu’on visite le Machu Picchu on découvre l’Intiwatana (“lugar donde se amarra el sol”), situé au sommet de la “colina sagrada”. Deux fonctions sont attribuées à cet étrange rocher taillé: mesure du temps (solstice et équinoxe), et autel.du rocher émerge dans la partie centrale une sorte de monolithe poli ayant plusieurs plans qui se termine en prisme quadrangulaire, dont les quatre angles indiquent les points cardinaux.
Ce qui frappe dans l’Intiwatana c’est que sa forme bizarre ne correspond à aucune géométrie rigoureuse, et pourtant elle irradie. Peut être aussi par l’usage du granit et l’écho de sa forme au paysage environnant.


Sculpture de Fernando de Szyszlo, à Miraflores, Lima


la même sculpture, sous un autre angle


On trouve dans le quartier de Miraflores à Lima, sur la promenade qui domine les falaises (las barrancas) et l’océan pacifique brumeux, une interprétation contemporaine de l’Intiwatana (ou intihuatana) par l’artiste péruvien contemporain Fernando de Szyszlo. L’artiste a su faire revivre dans le béton l’absence de symétrie ou même de dissymétrie de l’intiwatana du Machu Picchu, qui en cela rejoint certaines sculptures contemporaines qui présentent des formes incompréhensibles comme surgie de nulle part et pourtant, ou pour cela, fascinantes.


Thème préislamique réinterprété dans les années 2000.



au kraton Kasepuhan, à Cirebon

au kraton Kanoman, à Cirebon




A Java et à Bali, on nomme habituellement “pintu bentar” ou “candi bentar” ou encore “gerbang terbelah”, "pintu gerbang", un édifice formant porte, ou portail, composé de deux parties identiques et symétriques qui sont situées de part et d’autre de l’entrée. Cette construction ne comporte pas de partie haute reliant les deux côtés, si bien que la séparation entre les deux parties est franche et nette. Les deux côtés ne sont reliés que par les escaliers dans la partie basse. C’est un peu comme si un temple de l’époque hindo-bouddhique avait été fendu et divisé d’une manière parfaite. On pense que ces “portes fendues” sont apparues à l”époque de Majapahit (royaume de Java-Est aux XIII-XV ème siècles).


candi Ceto, sur les pentes du mont Lawu


En 2005 l'Universitas Gadjah Mada (UGM) a décidé d'édifier un portail pour marquer son entrée principale, et a pris pour modèle cette tradition architecturale issue de l'empire de Majapahit. Mais avec pour matériaux une base en granit noir (placage?), surmontée d'acier. Même symétrie. Comme on entre dans un temple, ou un palais, celui de la connaissance.


l'entrée principale de l'Universitas Gadjah Mada, avec sa pintu gerbang, et au loin la toiture javanaise joglo du Grha Sabha Pramana, bâtiment d'honneur et de réception construit au coeur de l'université

partie droite du portail


partie gauche du portail


Nota bene: les services de l'université, interrogés, n'ont pu à ce jour me communiquer le nom de l'artiste auteur de la pintu gerbang.

samedi 5 février 2011

Gelasius

l'église San Antonius de Kota Baru (littéralement "Ville nouvelle"), édifiée dans les années 1920.
Le clocher est doté des lignes pures de l'architecture de cette époque.


Un ami javanais vient de se convertir du protestantisme au catholicisme. A cette occasion il se doit de choisir un nom catholique. Il me dit qu'il a choisi pour nom Gelasius, ce qui me fait sourire car cela me parait tellement désuet; en France imaginerait-on quelqu'un se prénommer Gélase?!
Selon le dictionnaire Robert des noms propres :
"Gélase Ier (saint). 49ème pape 492-496 -Africain- Il prit des mesures charitables dans l'Italie ravagée par Théodoric, s'opposa à une restauration des Lupercales païennes, définit l'autorité pontificale dans l'Eglise et face au pouvoir temporel et promulgua définitivement le canon des Livres saints (décret gélasien). Le "Sacramentaire gélasien" (finVIIè s.) garde trace de ses transformations liturgiques."
le baptême


Cela dit, les Benedicta, Novena, ou Shela (parfois orthographié Sheila...), ou encore Monalisa, sont monnaie courante en milieu chrétien. Cela me rappelle les prénoms hispaniques, Concepcion, Encarnacion, Rosario, et autres Jesus... Mais, à bien y penser, nos prénoms français sont également souvent ceux des évangélistes ou des saints, et cela nous semble naturel. De même que les noms musulmans sont ceux des prophètes, des compagnons du Prophète Mohammad ou même de concepts religieux.

A vrai dire je n'ai pas encore élucidé le système des noms de personnes à Java. Ici il n'y a pas de nom de famille, parents et enfants ont des noms différents. Et il n'est pas rare de changer le nom d'un enfant lorsqu'il est malade, afin d'assurer sa guérison...

On estime qu'il y a à Java environ 90% de musulmans (chiffre que certains considèrent surestimé, la proportion de croyants de chaque confession étant un enjeu de politique intérieure), mais dans les villes la proportion de chrétiens, catholiques ou protestants, parait plus forte que dans les campagnes javanaises. Combien à Yogya? 15% ou 20% de chrétiens?


première communion


Mais musulmans, chrétiens ou hindous (surtout à Bali et Java-Est) vivent leur foi naturellement et avec sincérité, comme une pratique qui rythme leur vie et leur apporte en général une certaine sérénité, au delà de l'obligation constitutionnelle de croire en Dieu, entendu comme un dieu unique. L'athéisme ou l'agnosticisme sont peu concevables en Indonésie; cela revèle pour beaucoup de l'incompréhensible.

mardi 1 février 2011

"Le carrefour javanais, essai d'histoire globale", 20 ans après.


Le chef d'oeuvre en trois tomes de Denys Lombard, "Le carrefour javanais, essai d'histoire globale"(éditions de l'EHESS, 1990, réimprimé en 2004)*, admirablement écrit, lumineux dans ses analyses, dissèque l'univers mental javanais en remontant le cours de l'Histoire des années 1980 à la moitié du premier millénaire de notre ère. 
Depuis la parution de cet ouvrage, les évolutions récentes du monde et de la société indonésienne donnent matière à réflexion, tant on peut avoir le sentiment de vivre une époque charnière où tout s'accélère:

- bouleversement technologique (nouvelles technologies de l'information, téléphone portable),
- politique (avènement de la démocratie),
- religieux (nouvelle islamisation de la société indonésienne),
- et géopolitique (montée en puissance de l'Asie)

Sans faire de prospective l'auteur avait déjà pu observer les premiers signes du renouveau de l'Islam et de la montée en puissance de l'Asie.

"Dans l'Archipel au contraire, et sans doute parce que la royauté javanaise a eu la sagesse de faire sienne la nouvelle idéologie islamique, nous avons affaire à un très grand Etat qui se prépare à jouer un rôle primordial, non seulement dans l'évolution prochaine de l'ASEAN mais dans l'avenir de l'Asie en général" (in "Le carrefour javanais" Tome 3, p.156, chapître "Ultimes réflexions")

Avant la crise de 1998 et la "reformasi" (au lendemain de la chute du régime autoritaire du Général Suharto s'est ouverte une période de transition démocratique), les journaux étaient peu nombreux et largement sous contrôle du pouvoir. Désormais des centaines de publications sont diffusées dans tout l'Archipel. Sans compter l'accroissement important des autres publications écrites et en ligne.
A cet égard, les indonésiens se sont appropriés spontanément et passionnément le téléphone portable et l'internet, tant leur intérêt pour le réseau relationnel et la communication est inhérent à leur culture et à leur manière d'être. On voit les uns et les autres munis de deux téléphones portables, avec lesquels ils jonglent et qui souvent leur donnent accès à internet dès que leurs moyens leurs permettent. Les réseaux sociaux sur internet sont en vogue et très actifs. Toutes les informations circulent, tous les points de vue s'expriment.

Depuis le début des années 1980 une nouvelle islamisation de la société javanaise est en cours; le phénomène affecte au demeurant tout le monde musulman. Le foulard islamique (kerudung) est devenu commun, et les genoux nus des années 60 ou 70 se cachent sous les jupes longues, qui parfois ne sont pas à l'avantage de l'élégance féminine. S'il semble que la pratique religieuse soit plus soutenue, y-a-t-il pour autant un changement en profondeur de la société javanaise? En dehors de mouvements extrémistes (et le particularisme de la province d'Aceh auquel le gouvernement central a "accordé", dans le cadre de sombres négociations politiciennes, une autonomie assortie de l'application de la sharia que les acihais ne demandaient pas...) la vie quotidienne et l'ouverture aux autres des indonésiens ne semble pas en pâtir, mais qu'en est-il de l'avenir? 
La philosophie et le mysticisme javanais (kejawen, kebatinan), un peu en dehors des clous de la croyance de la croyance en un dieu unique, ne paraissent pas très menacés à première vue. Et les phénomènes paranormaux fascinent toujours beaucoup les indonésiens. Et cette islamisation est contrebalancée par le système démocratique en formation, et l'ouverture au monde liée à la mondialisation.

Par ailleurs, la constitution a pour clé de voûte le Pancasila, construction idéologique fondée sur cinq principes fondamentaux (croyance en Dieu, humanisme, nationalisme, démocratie et justice sociale); cette abstraction a été dictée tout à la fois par des impératifs d'unité nationale au moment de l'indépendance (déclaration d'indépendance le 17 août 1945) et par la puissance visionnaire de Soekarno, le père de la nation indonésienne. Le Pancasila, par la force de ses principes et l'adhésion de la majorité de la population (toutes convictions religieuses confondues), a jusqu'à présent évacué l'hypothèse d'une république islamique, du fait du risque d'éclatement du pays que cela impliquerait. De plus la décentralisation mise en place au début des années 2000, malgré des phénomènes de corruption à grande échelle, a transféré partiellement la responsabilité d'une meilleure gouvernance sur les élus locaux. Les indonésiens ne s'y sont pas trompés en n'accordant que peu de voix aux partis islamistes lors des dernières élections. Intuitivement ils semblent comprendre que le pouvoir corrompt et préfèrent que les religieux ne doivent pas y être associés. A moins qu'ils ne soient plus réceptifs à l'ouverture au monde qu'au discours religieux dogmatique.

"Mais la question se pose de savoir si les civilisations qui nous paraissent "grandes" aujourd'hui ne sont pas en fait celles qui, à l'aube de leur évolution, ont eu la chance de brocher sur plusieurs mondes à la fois et de se trouver comme l'Insulinde, en position de carrefour" (in "Le carrefour javanais" Tome 3, p.157. dernière phrase de l'ouvrage)

Dans les dernières lignes du "carrefour javanais", Denys Lombard formulait l'hypothèse que l'Indonésie retrouverait la place qui lui revient naturellement dans le concert des nations asiatiques. Cette hypothèse est en train de prendre corps. L'indonésie, désormais membre du G20, est en passe de devenir le pôle de stabilité en Asie du Sud-Est, et, forte de ses 240 millions d'habitants et de ses ressources naturelles, une puissance qui monte et qui compte, à l'instar du Brésil en Amérique latine.


*"L'étude envisage dans sa globalité l'histoire de Java, l'île la plus importante de l'Archipel insulindien, et cherche à en analyser les éléments formateurs, en privilégiant la notion de strate. Les différentes nébuleuses mentales sont étudiées dans l'ordre même où elles affleurent: celle d'abord que marque l'occidentalisation, la plus récente, que beaucoup pensent être la plus significative; puis celle formée au double contact de l'islam et de la Chine, dans les ports commerçants qui ont vu le jour à partir du XVème siècle; celle enfin qu'imprègne la culture indienne et qui reflète sous nos yeux encore le lointain souvenir des grands royaumes agraires." (notice de présentation de l'ouvrage par les éditions de l'EHESS)
T.I : Les limites de l'occidentalisation
T.II : Les réseaux asiatiques
T.III : L'héritage des royaumes concentriques